LES MINERAUX

La cristallisation (3)

 

Debout, pâle, il annonce d'une voix forte :
" La légende des soeurs Nichon et leur récurrence ! "
" C'est quoi la récurrence ? " demande Asthmatic-Man entre deux expectorations suspectes.
" CHUT ! " crièrent en choeur les autres bandits, enfin le silence se fit.


" Filles d'un riche et avare propriétaire terrien, les trois soeurs Nichon, Cor, l'ainée, Lébo et Tavumé, la cadette se mouraient d'ennui dans cette vallée perdue où la consanguinité et l'alcool de bois faisaient des ravages.

Ainsi quand un prince charmant vint avec son escopette pour chasser le blaireau (fort abondant) il eût tôt fait de séduire les jeunes filles, Fourme d'Ambert* , c'était son nom, promit de les aider à s'enfuir.

Son plan était simple, le moment venu, les trois soeurs devaient attendre devant le calvaire la sortie du carosse princier qui les emmènerait à la ville aux dix mille lumières.
Le soir prévu, les demoiselles préparèrent leurs affaires, ravies à l'idée d'échapper à leur inquiétant géniteur.
Quand il fit totalement noir, elles se glissèrent en silence hors de la maison familiale et se dirigèrent vers le lieu du rendez-vous.
Arrivées devant la croix de pierre, elles posèrent leurs baluchons et attendirent patiemment.
Il neiga énormément cette nuit là, une vraie tempête (peut-être les premiers effets du réchauffement climatique).
Le carosse avait pris beaucoup du retard, en arrivant devant le calvaire, Fourme ralentit, appela doucement mais ne voyant personne continua sa route car il ne voulait pas être en retard pour le bal costumé.
Les soeurs Nichon ne réapparurent qu'au printemps suivant, à la fonte des neiges.
Sagement rangées au pied du calvaire avec leurs petits sacs à la main, congelées mais intactes.
Leur triste destin marqua les esprits et l'imaginaire local.
C'est pourquoi certains soirs quand la neige tombe drue et que souffle la terrible " molle du lac*" on évite de sortir pour ne pas croiser ces trois pauvres créatures dans leur écrin de glace qui saluent doucement de la main les voitures qui passent ..."

 

Quand Peldugland termina son récit, tout le monde pleurait, même Denion de Lyon qui pourtant n'est pas un tendre.

 

* Fourme d'Ambert : Fils du redouté Came Ambert dit " le noeud coulant ", Fourme périt couvert de gloire et percé de trous à la bataille de Mécouille dans les Ardennes.

Son arrière-arrière-arrière-etc petit-fils chantera dans les Fromages ce qui est moins dangereux mais tout aussi glorieux.

* molle du lac : Microclimat psychologique et brumeux.

 

Le cruel Denion De Lyon est ému.

 

 

NEUVIEME EPISODE

 

Résumé du précédent

Perdue de vue dans les montagnes, Anne Masseur fût receuillie par des skieurs hors-pistes (comme quoi !).

Si elle ne risquait plus rien du défunt Maître Vibro, elle n'était pourtant pas au bout de ses peines.

Dans la forêt blanche de Phoebus un laboratoire est caché, des moutons paissent et passent devant, le ciel est rempli de trucs bizarres.

Sur le perron du bâtiment principal un scientifique en blouse bleue discute avec une scientifique en blouse rose.
Lui : " Je suis un honorable biologiste fraîchement divorcé ! "
Elle (troublée) :
" Tout est tellement parfait que j'ai du mal à croire que cela m'arrive à moi justement. Je croyais que la vie n'aurait plus jamais rien à m'offrir de magique, car c'est bien de la magie et j'ai peur ... "

Dialogue scientifique hypersexué.


Dolly, c'est le nom de la jeune personne, profitons-en pour la saluer :
" Hello Dolly ! " même si nous l'avons tous deviné, c'est en fait Anne masseur qui a changé de nom et trouvé du travail dans la recherche, sinon nous ne serions pas là !
Elle est visiblement terrorisée et pourtant le déroulement des premières expériences l'avait enthousiasmée.

Le clonage du clown blanc fût une vraie réussite immédiatement célébrée et jalousée par toute la communauté scientifique.
Le clownage ferait rapidement la fortune de son patron, le grisonnant et ambitieux Franck Einstein*.

* Franck Einstein : Fils prodige de Marie Chailet et du pur génie. Les fabricants chinois de jouets lui faisaient un pont doré jusqu'à Pékin pour venir y travailler en série* illimitée.

* série : Le clonage à l'infini du clown blanc allait permettre de transformer l'occident en un vaste cirque à ciel ouvert.

L'inquiétant mais brillant scientifique.

Bref les affaires marchaient très fort, mais Dolly commençait à s'inquiéter des regards bizarres que Franck Einstein posaient sur elle.
Etait-ce du désir, elle n'en était pas du tout sûre jusqu'au moment où elle comprit en un éclair toute l'horreur (et la dangerosité) de sa situation : l'infernal docteur voulait la dupliquer à son tour.
Depuis cet instant elle se méfiait et fermait sa porte à double-tour.
Le lendemain matin, Jeanne, la femme de chambre vosgienne remarqua en entrant pour faire le ménage quotidien :
" Tiens la petite a laisse sa fenêtre ouverte, pourtant les nuits sont encore froides ! "

Dehors, sur la verte pelouse, des " Dolly " par douzaines jouaient à saute-moutons ...
Et les cristaus dans tout ça ?
Franck en abuse pour stimuler sa créativité, et même s'il dit que c'est du sucre en poudre, ses sinus en sont tout irrités.

DIXIEME EPISODE

Résumé du précédent Anne Masseur n'a rien vu venir mais il est impossible aux enquèteurs de recueillr son témoignage car elles sont trop nombreuses et on ne peut légalement établir qui est l'originale.
A défaut (et pour le principe) Franck Einstein est accusé de réception (de Lyon ?).
Il en prend pour dix ans bien ferme.

La prison est une longue bâtisse grise aux fenêtres grillagées sur la route de Rouen entre Les Essarts et La Bouille.

Cette maison d'arrêt sert aussi pour les bus et c'est au rez-de-chaussée que Franck y purge sa peine* en espérant qu'elle le purge aussi.

* peine : Il en a beaucoup.

Sa cellule est située dans un quartier très calme de " haute sécurité ", de ce point de vue limité, il n'a pas à se plaindre.
Mais comme tout les prisonniers du monde, il ne rêve que d'une chose : se faire la belle*.

* belle : Laquelle ?

 

A part l'e-naccessible femme du directeur, les femelles sont absentes de son carcéral environnement.
Son cerveau hypertrophié fourmille tout seul et vient de lui fournir un plan détaillé pour se tailler.

La grande évasion.


Johnny, un gardien saoûldoyé (deux précations valent mieux qu'une) a volontairement oublié de refermer les portes du pénitencier.

A un signal convenu (tellement convenu qu'il n'attire pas l'attention), Franck Einstein enjamba la fenêtre et sauta sur le terrain de basket.
Il avait besoin d'un complice (c'est comme ça dans les vraies évasions), il choisit Leroydécon, son voisin, un perpétuel repris de justice, de vertiges homicides et de boissons fortes par dessus le marché.

 

Leroydécon, son complice en tout.

 

Leur coup était mauvais mais réussi et ne passa pas inaperçu des autres détenus.
Cette prison petit-modèle théoriquement prévue pour 320 pensionnaires en contenait en fait 21288 au dernier recensement et c'est un véritable flot humain qui se répandit comme un insecticide ravageur dans le paisible bocage alentour, se nourrissant de pommes encore vertes et de surveillants à peine cuits.

Pendant son séjour derrière les barreaux, les cheveux de Franck ont bien poussé.

En se faufilant à travers l'épaisse fumée des barbecues improvisés, Franck Einstein eût encore une idée (de génie, c'est normal) :
" En déposant dans un de ces grills express mes chaussures, mon dentier et ma médaille de communiants avec mes initiales, on pensera que j'ai fini cannibalisé par de jeunes délinquants affamés ... "

Aussitôt dit, aussitôt fait !

" Arf, arf, arf ! " son rire dément et maléfique résonna encore quelque temps sous les vertes frondaisons.
Puis il disparut dans la nature bien décidé à ne jamais revoir sa Normandie.

ONZIEME EPISODE

Résumé du précédent

Emma Soeur démultipliée, Maître Vibro explosé, Franck Einstein volatilisé, nous approchons du dénuement le plos total.
Et le dénouement, c'est pour bientôt ?


Pincemi est tombé à l'eau, il reste plus que ...
Pince-moi (Aie !), ne serait-ce pas la princesse Diladi assise sur un monceau de terre qu'elle décape avec Minutie, sa fidèle brosse à dents ?

Leg 12 Diladi avait encore déménagé suite à l'anéantissement d'Aifondremand, sa dernière demeure.

" Et puisque nous sommes dans les débris, restons-y ! " se disait-elle.
Elle avait donc rejoint un chantier de fouilles archéologiques pensant enfin trouver un peu de repos dans l'érudition et la patiente exhumation du passé par couches successives.
Son calme, son apparente douceur et son toujours remarquable décolleté donnaient toute satisfaction aux professeurs X ET Y* qui dirigeaient les travaux.

* X et Y : Nous leur garderons l'anonymat, c'est préférable. sa vie était studieuse, spartiate mais finalement agréable et tranquille sous sa tente qu'elle avait joliment décorée.

 

 

Jusqu'à ce petit matin blème où des cris, des insultes et les échos d'un farouche combat lui parvinrent du bas d'un monumental escalier.
" Pif, paf , salaud, prends ça, voleur et vlan ..."

Les deux éminents professeurs en pyjamas se battaient comme des chiffonniers en soulevant un précieux nuage de cendres et de poussières préhistoriques.
Qu'est-ce qui avaient pu les mettre dans une pareille fureur.
La réponse était simple et facile à deviner : la jalousie.

Bonne entente de façade
entre les deux chercheurs.

 

Quelques trouvailles annotées et classées

 

Tout avait commencé la veille à la suite d'une surprenante découverte faite par le professeur X, il dégageait avec d'infinies précautions une cuvette de w.c gallo romaine quand son attention fût attirée par un curieux détail.
Il aperçut derrière le tuyau d'évacuation d'eau en céramique une petite pochette en cuir soigneusement dissimulée.

 

 

Le chercheur dégagea doucement l'objet et fit l'inventaire de son contenu, à l'intérieur il trouva quelques fragments de fines feuilles de papyrus gommé, un morceau de carton découpé avec soin et une petite " barrette " d'une substance noirâtre à l'odeur encore forte malgré tout le temps passé sous la terre.

Son analyseur de poche lui donna rapidement la composition du produit :
dicotylédone apétale ou chanvre* indien.

* chanvre : Plus communément appelé cannabis (ou hascich en orient) et toujours consommé de nos jours.

 

La fameuse pochette surprise,
objet de toutes les convoitises.

 

Le professeur X n'en croyait pas ses yeux, ainsi en pleine époque impériale, les futurs élites de la puissante Rome se cachaient dejà dans les latrines pour fumer des joints, c'était vraiment stupéfiant !
Plein d'enthousiasme il fit part à son collègue de sa fantastique découverte.
Il ne remarqua pas la lueur de dépit et d'envie qui s'alluma de suite dans le regard du professeur Y.
Le lendemain matin, la pochette était vide, le professeur Y avait les yeux rouges, la bouche sêche et souriait insupportablement.
La bagarre commença illico et elle dure encore.
Diladi était encore une fois déçue et ce pour deux raisons.
La première est qu'elle avait toujours pensé que la soif de connaissances, la recherche de la vérité scientifique étaient au delà des mesquineries humaines.
Visiblement non. sa seconde cause d'irritation touchait à sa féminité (Oh,oh,oh !) car elle s'était imaginé un instant être l'origine et l'objet de ce furieux combat, en clair qu'on se battait pour ses beaux yeux d'orientale.
Et bien même pas.
" Sniff, sniff ... je retourne faire mes valises ! "

 

Un dernier cristal pour la route ?

 

 
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