FONDATION GELLIPANE

PROGRAMMATION

 

 

 

" PLEUREUSES "
ARTISTE : LES VIERGES MARRIES
GENRE : lamentable
EXPOSITION n° 53 - 2

.

 

 

 

A l'écho des lamentations qui s'échappaient de la salle d'exposition, le directeur devenait nerveux :
" Oh, ça va être comme ça tout le temps ? "

Les Vierges marries n'arrétaient pas de chialer depuis leur arrivée.

Peut-être à cause du nouvel éclairage, beaucoup plus économique mais très irritant pour les globes oculaires.

" Qu'est-ce qui se passe ici, vous avez perdu quelqu'un ? " demanda Guy Molet en ôtant son écharpe.
Leur inconsolabilité faisait problème au poète :
" Pourquoi pleurent-elles ainsi, Octave ? "
" C'est parce qu'elles n'ont pas connues l'amour, ou pas assez longtemps ! " lui répondit le plastichien qui s'y connaît en femmes.
" Si ce n'est que ça ... de l'amour j'en ai toujours en stock, surtout au réveil, par exemple ce matin ... " reprit de volée notre vigoureux chef (de bande ?).
" Halte mon beau directeur, vous n'allez quand même pas souiller ces chastes vestales ? "
" Je ne veux souiller personne Guy, mais j'aimerais qu'elles cessent un peu de chougner sinon nous n'aurons pas un chat dans notre belle exposition. "
Mais le directeur se trompait (pour une fois !) car le soir du vernissage la Fondation était pleine de pleureuses accompagnées ou de seuls pleureurs, chats et chattes enfin réunis.

Parfois les lamentations s'arrêtaient brusquement et les vierges marries prenaient une pose suggestive.

" Elles feraient une bonne publicité pour les cornets de monsieur Gellipane ! " réalisa Peldugland.
" Les chants désespérés sont toujours les plus beaux ! " se disaient les visiteurs à l'oreille.
C'était donc la raison du succès.
Il arrivait de plus en plus de monde de plus en plus triste.
Nos inexistantes normes de sécurité étant dépassées depuis le début, il nous fallait avoir l'alarme à l'oeil.
C'est ça être responsable (à la Fondation Gellipane) !

Les vierges marries se dévétirent dans un bel ensemble et improvisèrent une danse sauvage que les mieux informés d'entre nous qualifièrent de " culte à la fertilité ".

La chorégraphie réjouit petits et grands, surtout les grands car les petits avaient un peu peur.
A cette occasion nous exposons (et vendons) des larmes, pour tous les goûts, salées, amères, sucrées-salées, blanches, de verre, de sang, de joie de préférence.
Elles sont peu chères, surtout à Marseille mais ici, pas question d'avoir sa larme à l'oeil !

Chaque acheteur recevant une part du gigantesque flan que nos vierges avaient bien préparé ; comme quoi on peut-être artiste et bonne cuisinière, c'est sans contradictions.
Le directeur s'extasiait devant les chiffres de son commerce intérieur :
" C'est fou ce qu'on arrive à vendre*, j'ai beau m'y être habitué ça n'en finit pas de m'étonner ... "
" Un collègue a même réussi à fourguer deux pots de fleur géants la semaine dernière ! " reprit au bond le touriste avec un (tout petit) soupçon de jalousie.

" Non ? Sans qu'on ne remarque rien ? Et personne n'a rien dit ? Il a sûrement des complices pour réussir un coup pareil ... sacré Octave.
J'ai bien vu que vous plaisantiez, ah, ah, ah, c'est la meilleure !
" conclut avec une grande claque dans le dos notre génial dirigeant dans une éclat d'hilarité trop contagieuse car de pure servilité.

 

Bref la bonne humeur rêgnait tandis qu'on bradait les dernières icônes pleureuses :
" Une petite larme ... pour la route ? "

* vendre : En particulier aux institutions, c'est beaucoup plus facile vu que ce n'est pas leur argent mais celui des cons tribuables à merci.

 

La vue des billets doux consola comme par miracle nos Vierges marries, qui se marrent depuis car souvent femmes varient ; c'est une bonne happy-end point trop misogyne.

 

Le directeur voulait absolument
rencontrer les artistes
avant leur rhabillage.

 

 

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