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DONATIENNE
Le premier avril à Mayonne
Sur
ce document, nous pouvons voir Bertrand en pyjama rose battre le tambour
et crier sa joie, il vient de faire sa première conquète au pays du
cassoulet. |
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Réflexions
croisées *
Donatienne
:
" Tu veux te débarasser de moi, en faisant semblant de ne plus te
souvenir de rien ? "
W.S.R
:
" Tu a raison chérie. "
* Réflexions croisées
: Extraites de dialogues amoureux, ces réflexions croisées nous
montrent deux choses : qu'on ne s'écoute pas vraiment et qu'on ne
s'entend pas toujours. Ce qui n'exclut heureusement ni la tendresse
et surtout pas le désir.
Ce qui heureusement n'empêche ni les sentiments, ni la tendresse
et surtout pas le désir.
Ces constants malentendus sont même un des ingrédients principaux
du futur mélange explosif, et dans bien des cas; ils en seront le
détonateur.
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Nous sommes à Mayonne sur
la place du Tartre, il est 13H18 et nous attendons le héros de cette histoire
qui est déjà en retard sur le planning.
Ah, le voila qui arrive ... il a l'air perdu, égaré ... une jeune femme
passe devant lui, il la suit des yeux, puis des jambes et de son reste
corporel il faudra vous y habituer).
Lapin.Blanc.Rapide apparait, personne ne le connaît encore, tant mieux.
Nous lui faisons de grands signes, Bertrand Biquet nous rejoint lentement,
tout en se retournant.
" Ca m'ennuie de laisser tomber cette mayonnaise ... " constate avec regrets
l'hésitant héros qui entre enfin dans le vif de notre sujet.
Il aurait préféré rentrer dans le vif de son sujet à elle.

Lapin.Blanc.Rapide,
personne ne le connaît encore, tant mieux.
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Bon, il serait grand
temps de commencer, tout le monde sont prêts depuis longtemps et
le ciel est en train de se poiler (pardon, se voiler).
Bertrand fait durer le
déplaisir :
" Euh, avant je mangerais bien quelques maïonnettes* !"
On ne peut pas lui refuser cette sorte de dernière cigarette du
con-damné.
A la baise éclectique.
* maïonnettes : Spécialités
de Mayonne, l'équivalent de la baïonnette de Bayonne*, en moins
piquante.
* Bayonne : Où il
y a beaucoup de gens bons, par ailleurs.
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C'est donc dans un but strictement
culinaire* que Bertrand avait poussé la porte du " Bli-Bli d'or " afin
d'y déguster des aspics en gelée verte et des maïonnettes farcies* aux
ceps de vigne.
* culinaire : Plaisirs de
la bouche.
* farcies : D'une très bonne
farce car nous sommes le premier avril, rappelons-le.
Quand elle prit sa commande,
les seins de l'incroyable serveuse se posèrent comme deux beaux flans
sur le guéridon qui en frémit longuement.
" Donatienne, tu nous oublies ? " appela un client.
La fastueuse poitrine se retira lentement.
Les présentations étant faites, bon appétit !

Bertrand
avait grand faim, il prit un menu gagastronomique :
Maionnettes farcies donc, trois belles touffes
de Pubisse
et quelques aspics rateurs* en entrée (et en gelée blanche finalement).
* rateurs : Très difficiles
à réussir.
Le garçon était au beau milieu
de ses agapes quand la patronne du lieu revint dans la salle mais sans
son tablier à fleurs qu'elle avait troqué pour un ensemble compliqué de
voiles et de gazes transparentes.
Qui ne tenaient pas bien.
" Vas-y Mailleté, fais nous perdre la boule ! " criaient déjà les habitués
aux premiers accords d'une très moyenne musique orientale.
On met donc en marche la boule à facettes.
Et on tamise les deux projecteurs ... beaucoup d'agitation dans la cuisine
(qui sert aussi de loge).
Le sonore rideau de pendants plastifiés s'écarte et, mélée au parfum lourd
et fade des graisses froides, surgit l'attraction*, avant le dessert et
sans aucune gravité.
POINNNK
!
Un immonde larsen traverse
la petite salle, cherchant une issue.
Puis une voix incertaine annonce dans un micro dont nous tairons la marque
:
" Là voili, là voila ! Celle que l'on attendait plus, depuis longtemps
... j'ai nommé la généreuse, la pétulante, la froufroutante ... la danseuse
du Bli-Bli ! "
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Salve d'applaudissements,
vrais sifflets, faux youyous.
Ouf, ce n'est pas Mailleté ... mais Donatienne, sa fille qui la
surpasse tellement en rondeurs et circonférence qu'il faut pousser
toutes les tables afin qu'elle s'ébatte à son aise.
Malgré son embonpoint, elle se déplace avec facilité et une certaine
grâce*.
* grâce : Qu'elle
y consacre beaucoup de temps.
Elle courbe tellement
l'espace autour d'elle que le pauvre ne sait plus où se mettre.
Il ne reste plus qu'une seule table, celle du gourmet lapin, la
danseuse vient très normalement se poster devant-elle avant d'écarter
un à un les sept voiles qui dissimulent son ventre rond, si large*
et si imposant qu'il semble occuper la pièce entière.
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* large : Précisons, Donatienne n'est pas grosse* mais bien enveloppée,
plusieurs fois.
* grosse : contrairement
à tout ce qu'on dit sur les blondes, les hommes* préfèrent les grosses.
* hommes : Ceux d'avant,
les vrais.
Eux ce ne sont pas les yeux qui les intéressaient le plus, ni les mains.
Culte de la fécondité oblige,
on s'en tenait (bien) à l'essentiel.
Qui est dans l'acte, elles le savaient déjà ... ces futures consommatrices.

Entre femmes,
on en parle sans cesse.
Notre préhistorique lapin
aime aussi les rondelettes et la rotondité terrestre, disons qu'il les
adore, en silence.
Il bouge juste les oreilles dans un mouvement en double-hélice caractéristique.
Il a son propre culte de la fertilité avec ses petits rituels secrets
et compliqués.
Vulves nouvelles,
vulves anciennes, vulves sages ou vulves folles ? |
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" Hmmm, délicieuse
ces petites Touffes, et quelle sauce ! " |
Bertrand déglutit sa dernière
bouchée, ses yeux ne pouvent plus quitter le point noir joliment tatoué
d'une spirale et percé d'un brillant brillant, complètement hypnotisés
par ce mouvement ample et régulier comme les vagues de l'océan. Flux et
reflux ...
Le garçon se laisse bercer par cette houle souverraine et il ne tarde
pas à avoir le mal de mer.
L'infatigable bassin remuait toujours, Bertrand a maintenant le nez tout
contre la chair tremblottante qu'il effleure (et qui l'effleure) à chaque
retour de son infernal balancement.
Il est complètement au pouvoir de la danseuse du bli-bli, suivant des
yeux le moindre déplacement du lumineux nombril, en ouvrant et refermant
la bouche comme un poisson hors de l'eau.
Tout en poussant de petits cris brefs aussi inaudibles que des ultras-sons.
Donatienne,
sûre d'elle, fit exécuter à Bertrand quelques tours qui amusèrent
beaucoup les autres joyeux convives, devenus subitement de cruels
voyeurs.
Ainsi le fameux tour dit " de Passe-Passe " qui consistait pour Bertrand
à passer entre les énormes cuisses de la danseuse pour tenter de ressortir
intact de l'autre côté.
Ce numéro ayant beaucoup de succès, le garçon dut le refaire plusieurs
fois. Ils enchaînèrent avec le vertigineux tour " Niquet* ", rebaptisé
depuis leur performance tour " Biquet ", c'est tout en son honneur.
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Donatienne a des
formes généreuses,
c'est un euphémisme si doux.
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* Niquet : Du nom
de son sinistre inventeur, ce mauvais tour demande (il exige !)
force, adresse et résistance des tissus : il faut saisir fermement
son malheureux partenaire par la queue (vous pouvez pas dire le
pénis, on n'est pas des bêtes !) et le faire tourner telle une hélice
au dessus de sa tête ; avec grâce si possible.
En suivant la musique*, c'est encore mieux.
* musique : Nous
vous conseillons le Boboléro de Mavel.
En version accéléré.
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" Quel cirque ! " soupirait
Bertrand qui ayant largement dépassé la trentaine, échappa au vicieux
tour " Novice " auquel il n'aurait sans doute pas survécu.
Il eut quand même droit à son tour de piste aux étoiles.
Toujours tortillante, Donatienne lance de noires oeillades* à son public
avant de disparaître, suivi du garçon titubant derrière le rideau à cliquetis,
sous le regard courroucé de sa mère.
* oeillades : Elles ne se
mangent pas, juste les noyaux.
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" Encore, encore ! "
exigeait la clientèle en tapant du pied.
Devant ces frénétiques rappels, la dompteuse du ventre ne put que
s'incliner (à ces moments ses fabuleux seins touchaient presque
le sol carrelé).
Donatienne salue, ravie de son succès ; d'aucuns diront qu'elle
prend toute la place, c'est vrai, ne pouvant pas faire autrement.
Elle bouche littéralement la vue basse et en met plein partout ailleurs.
Au pied de cette murailles
de chair, nous nous interrogeons : où est donc passé Lapin.Blanc.Rapide
?
On ne le voit plus ... ce serait bien embêtant de l'avoir perdu
car il est, pour le meilleur et pour le pire, notre héros ... et
ce n'est que le début de l'histoire.
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Ah le voila, il était derrière, et même dans son derrière, caché entre
les grosses fesses de la danseuse d'où émergent seulement ses deux avant-bras
(et le bout de ses oreilles) qui s'agitent frénétiquement.
Le prodigieux duo est reconstitué.
On applaudit beaucoup, et avec raison, cette nouvelle (et ultime, ouf
!) facétie.

Bertand était en nage.
Et en âge légal d'être le nouveau prince consort (et qu'on sortit avec
peine de ce redoutable étau), Donatienne le fit donc royalement monter
sur sa couche, un haut lit à baldaquins.
Il l'avait bien méritée !
Sa récompense, sa douceur, son susucre !
Ensemble ils firent la petite danse des ventres tiédes qui fait tellement
de bien par où ça se passe de commentaires.
Le lit était si profond qu'une fois en son centre, les côtés se dressaient
tels de hautes et blanches falaises de craie comme à Etretat Impossible
de s'échapper de ce piège drapé !
Comme une pauvre mouche glissant sur les parois lisses de sa fatale droséracée
qui s'apprète à la digérer, Bertrand s'obstine à vouloir grimper.
Malgré tous ses efforts, il retombe toujours au milieu du plumard carnivore
où l'attend l'insatiable Donatienne.
Alors vaincu et fatigner de lutter, il se laisse mollememt aller...
Persuadée (non sans raisons) que ses rondeurs sont une (grosse) partie
de son succès, Donatienne s'alimente comme un sumotori ; quand elle sursaute
lègérement, à l'autre bout du lit Bertrand s'envole en alternant les figures.
Seul le baldaquin l'empêche
d'aller plus haut.
Lapin.Blanc.Rapide est sur le dos et remue les pattes*...
Une autre secousse :
" Coucou, mon Bicou ! "
Il faut toujours bien faire monter la mayonnaise, il s'y emploie du temps.
* pattes : Rappelons
que dans le monde fascinant des insectes, la femelle est souvent
plus grosse que le mâle et qu'elle l'apprécie surtout en guise de
case-croûte.
La peur change donc logiquement de camp.
C'est une attitude commune aux phasmes incrédules et aux mantes
(même athées).
" Je vais lui tapoter
le bout des pattes, d'habitude ça leur plait, tap-tap-tap, j'espère
qu'elle est du genre chatouilleuse ... " Exciter, mais pas trop,
tout un art périlleux.
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Au matin blème, le garçon exténué
promit (et jura suisse) de revenir très vite voir danser afin de pouvoir
encore frotter sa brioche naissante à son bli-bli diamanté. Inutile de
préciser qu'on ne le revit pas de sitôt à Mayonne tant il redoute de retomber
au pouvoir hypnotique de la bandante (pardon, l'abondante) clitodalisque.
" C'est un numéro ... unique ." commenta l'artiste dont la tournée ne
fait que commencer.
Ses pauvres testicules* étaient encore toutes bleues et endolories quand
il arriva à Saint-Fellix.
* testicules : Vous ne
pouvez pas dire couilles comme tout le monde ?
Non, car ce texte a une prétention littéraire, et nous avons déjà la prétention,
il nous manque juste la respectabilité.
Pour exister.
Dans le monde des lettres.
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