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Toute cette histoire commence
comme une plaisanterie (ce qui est bien post-moderne), la suite sera moins
drôle.

Finalement,
mes petites manoeuvres seront plus efficaces que les grandes.
(document secret-défonse)
Un matin arrive une lettre à en-tête de la République.
Dans ce courrier tricolore Peldugland apprend que la nation a un besoin
pressant de sa présence sous les drapeaux (car dessus, c'est inconfortable).
Donc un matin sinistre et glacé, il descendit à moitié endormi d'un train
dégueulasse plein de mégots et de canettes vides pour se retrouver avec
une foule d'autres, les pieds dans la neige sale et l'esprit ailleurs,
mais où ?
Dans le ciel
passent de curieux corbeaux qui volent sur le dos. |
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Le comité
d'acceuil. |
Il vient d'être incorporé (forme
bizarre d'incarnation) dans l'armée, plus précisément dans l'artillerte
et plus précisément encore dans l'artillerie nucléaire ; plus précisément*,
je ne peux pas, bien que la précision soit nécessaire (surtout dans l'artillerie
" reine des batailles ").
* précisément
: ici tout est secret et il ne vit jamais les terribles et mystérieux
" Pluton " pour le service desquels il était sensé être là.
Dans ses rêveries
faméliques, il voit des Pluton multicolores certes mais surtout des
piles de barres chocolatées ventrues, des " Mars ", le dieu de la
guerre, encore lui ! |
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Ce n'était pas son problème,
en mettant les pieds gelés dans cette caserne perdue au milieu des sapins
nains, il se jura d'en repartir le plus vite possible.

A ces moments
délicats, sa principale force était son insigne faiblesse.
Pour celà il décida d'une stratégie qu'il jugeait imparable : il cesserait
de s'alimenter ne doutant pas de s'effondrer au bout de quelques jours.

Sous
la protection de " main-soeur "
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C'était sans compter
avec l'incroyable résistance du corps humain et ce n'est qu'au matin
du treizième jour que, vrai squelette ambulant, il lâchait enfin
son lourd et encombrant fusil et glissait dans un évanouissement
salvateur sur le terrain d'exercice bitumé que balayait une bise
d'outre-tombe.
Il fût humainement traité
et vu son état, dispensé de toutes activités militaires.
En attendant sa future hospitalisation et sans doute réformation
(de Lyon ?) il restait bien au chaud dans la chambrée vide à regarder
le reste du monde courir dans la neige sale.
On le laissait enfin
en paix et puis on lui dit de rentrer chez lui.
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Ce qu'il fit une semaine
plus tard, en arrivant son chien faillit le mordre, dérouté par
son crâne rasé, son air hagard de Strasbourg et sa quinzaine de
kilos perdus.
Pourtant il avait, comme sa mère, la fibre patriotique ; il se trouvait
même exagérément sensible et poreux aux actes de sacrifice et de
bravoure qui lui mettaient l'alarme à l'oeil.
Mais il y avait un écart trop grand, un vrai fossé anti-char entre
ses idéaux glorieux et la plate réalité de la caserne, son invincible
ennui et sa mesquinerie quotidienne.
Il serait un héros transnational, comique et non-violent.
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Les adieux furent
brefs.

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