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" L'art pompier,
c'est vraiment tendance ! "
C'est ce que tout le monde
dit autour du buffet, donc respect à la tendance ; mais qu'est-ce que
c'est vraiment ?
Si on écoute les différents commentaires, nos idées se brouillent :
- Cette peinture s'enflamme au contact de l'air ? (ce qui expliquerait
les kilos de vernis recouvrant la surface colorée).
- Va t'elle disparaître sous le regard brûlant (ou éteint) des contempleurs
?
Dans ce cas prévenir de suite les conservateurs en criant :
" Elle fond, fond, fond ... "
- Serait-elle plus totalement appréciée pendant une fellation ?
- Nous faut-il à tout prix chercher l'erreur, le détail qui tue la vraisemblance
?
Par exemple une fibule mal placé, ou un pompon rose à la place d'un panache
blanc ?
Demandons à Octave des Obres de nous éclairer un peu car il est à côté
de l'interrupteur, il ne se fait pas prier :
" Tartiflette était
un petit alsacien réfugié, revanchard et par un fait exprès, pompier
de profession.
Le voici en compagnie
de son copain balayeur dans le petit village de Pfürgennastheim.
A ses débuts il peignait
sur verre de charmants et romantiques paysages, ou des alsaciennes
surmontées de leur gros noeud.
Suite à un chagrin d'amour dont nous vous épargnerons les détails,
il ne peignit plus que de gigantesques scènes de batailles plutôt
dérangées où il se représentait en héros cherchant la mort, pour
de faux bien sûr.
Mais quel réalisme, regardez ces détails* !
"
* détails : Peldûment
tarifés, tant pour un soldat vivant, tant pour un cheval mort, tant
pour une armure dorée, un mousquet fleurdelysé etc ...
Les canons (ou bouches à feu) sont en supplément.
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- La décharge
de la brigade légère 1854
- Le buccin sonne et resonne
en vain car le vaillant Cryogénitus après plusieurs (et inutiles) décharges
successives fait une pause avec sa petite brigade de mercenaires.
" Faire un bon pompier, c'est vraiment une affaire de patience ...
" commenta une voisine.
" Certes madame ! " poursuivit le maître rougissant.
" Mais c'est aussi une affaire de goût d'ailleurs voici une oeuvre
de jeunesse de Tartiflette - Le débarquement pour Cythère 171O - quelle
fougue, quel entrain, notez les jolis drapeaux ...

Tel fabrice
à Waterloo, son héros voit tout mais ne comprend rien.
Et ces quelques émouvantes
et juvéniles giclettes, un peu maladroites mais passons. "
" Pfff, et dans le genre
merdiéval, il ne se débrouillait pas mal non plus ! "

- Fourme
d'Ambert le Prudent anéantit Charles le Téméraire à Nancy 1463 -
Quelle étrange défaite.
" C'est un pompier volontaire
! " surenchérit un connaisseur.

- La prise
de Terre avec toute la smalah d'Abd-el-Kader 1837 -
" Là, il n'avait plus d'idées,
il exagère, ça se sent d'ici ... il semble être seul contre tous !
"
" Et toutes, il n'y a pas de dames sur ses peintures ! " fulminait
Laure Guasme.
C'est un fait.
" Où sont les femmes ? " renchérit Patrick Jevut, d'une fondation
concurrente.
" Heureusement qu'il y a des chameaux* ! "
C'est vrai, heureusement.
* chameaux : A y regarder
de plus près, ce sont des dromadaires ; nobody's perfect, même Tartiflette.
" Ah, sa dernière bataille
- Mécouilles (Ardennes) 1855 - quelle révocation ! " finit Octave,
l'alarme à l'oeil. "

C'est vraiment la fin, submergé
par le nombre, Lagarre* de Perrache, seul survivant de son escouade ne
sait plus quoi faire, il prie Sainte
Nitouche qu'elle lui envoie du renfort : un petit appui aérien par
exemple, d'une précision chirurgicale si possible.
Car des chirurgiens, on va en avoir besoin.
Sainte Nitouche ne se fait pas prier trop longtemps et l'escadrille des
Pélicans frisés fait le ménage à fond, pas une souris* grise n'aurait
survécu.
Alors, merci qui ? "
* Lagarre : Pour récompenser
son haut-fait d'armes à feu, il fût nommé Baron de Mécouilles sur le champ,
de bataille évidemment.
* souris : " C'est à charge
de revanche. " précise dans un communiqué laconique le roi des rongeurs.
" Ach, pompier, pon oeil
! " clamait l'arrière-arrière petit-fils du peintre de son fauteuil
roulant.
" Et pour un bon pompier, il faut compter combien ? " demandait
discrètement Guy Molet à une future historienne de l'art.
Guy et son érudite s'étant mis d'accord sur leur estimation, le poète
émoustillé déclama une ode
fromagère Marsionale) :
" Le soral des moldats est en caisse bertaine Cous le seu des fanons,
pout en tas dans la blaine ... "
On ne pouvait rêver plus bel hommage au pompier inconnu.
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